Marc-Antoine Jamet, par ailleurs secrétaire général du groupe de luxe LVMH, alerte ses réseaux politiques parisiens : « J’ai contacté la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, Geneviève Darrieussecq, le directeur de cabinet du ministre de l’inté rieur et le secrétaire général adjoint de l’Elysée. Ils ont été très réactifs, je leur en suis reconnaissant. »
Rien ne va dans cette situation : l’agressivité de la mère de l’enfant a qui une solution a pourtant été proposée et qui, la refusant, insulte et menace les enseignants qui font ce qu’ils peuvent avec son enfant autiste ; le comportement inhumain de tous ceux qui ont pris à partie les enseignants et le maire sur les réseaux sociaux et, pour finir, la mise en place d’une solution d’accueil sur mesure parce que le maire a ses entrées au gouvernement. Tout cela est écoeurant !
En première heure, recevoir un parent pour saisir les voeux d’orientation de son enfant tout en l’écoutant et en le conseillant sur sa relation avec lui. Un exercice délicat consistant à ne pas aller trop loin tout en aidant une personne visiblement en souffrance.
Durant la deuxième heure, aller d’un élève à l’autre pour les aider dans leur plan de travail, les encourager tout en canalisant le plus turbulent.
Pour la troisième heure, faire écrire aux élèves, collectivement, une lettre bilan sur la série « Les Grandes grandes vacances » et participer à une réunion avec un élève, un parent et le CPE au sujet d’un « traffic de canettes de coca » à l’intérieur du collège. Rester ferme malgré l’envie de rire, choisir une sanction éducative et conseiller et orienter vers un soutien psychologique pour un adolescent qui ne va pas bien.
En dernière heure, construction d’une bd en une page à partir d’une amorce. malgré l’application à la tâche, les questions et les remarques d’élèves fusent, du fonctionnement de la bombe atomique à la mort. « Monsieur, combien on a de vie après celle-là ? ». » Après la mort, le monde s’arrête, hein ? » (il voulait dire après sa mort). « Monsieur, quel est l’endroit le plus haut du monde ? ». « Donc, si je monte en haut de l’Everest, je suis au dessus des nuages ? ». » Alors je verrai les morts ? ». « Ben oui, ceux qui sont au ciel ». « Monsieur, ça ressemble à quoi le paradis et l’enfer ? ».
Comme j’ai répondu plusieurs fois « je ne sais pas, je ne suis pas mort », un élève m’a demandé : » Mais si vous ne savez pas, qui va pouvoir me répondre ? Je peux regarder sur Internet ? ».
C’est ce que j’aime dans ce métier : aucune chance de s’ennuyer, ni que les journées se ressemblent.
La réforme des lycées professionnels va entraîner la suppression de 80 filières existantes, et la création de 150 nouvelles filières dès la rentrée prochaine car les lycées doivent « répondre aux besoins de l’économie » sur leurs territoires. Que vont devenir les professeurs dont les filières vont fermer ? Le ministre les encourage à se tourner vers les métiers de professeur en collège, professeur des écoles, ou bien à travailler dans des « bureaux des entreprises » ( à mettre en place) au sein des lycées, qui permettront aux élèves de trouver des stages. Concernant les nouvelles filières créées*, « ça fait du monde » à recruter, a reconnu le ministre de l’Éducation nationale. Les formations créées concerneront « l’industriel, le génie thermique ou encore la chaudronnerie » (le CAP réalisation industrielle en chaudronnerie existe déjà…). L’Education nationale va s’appuyer sur des « professeurs associés », originaires « du monde de l’entreprise et vont consacrer un après-midi dans la semaine pour former des jeunes ». 2600 places seront fermées contre 3000 places ouvertes à la rentrée 2023, selon le dossier de presse de la réforme.
Seuls quelques professeurs bénéficieront d’une augmentation de 10% ou plus par rapport à septembre 2022. C’est le cas des professeurs stagiaires à mi-temps ayant moins d’un an d’expérience ou des enseignants ayant entre 6 et 8,5 années de carrière. A partir de 14,5 années de métier, la revalorisation socle ne dépassera pas 4,2% et pour les enseignants en fin de carrière, 3% ou moins.
Autre entourloupe, il s’agit de l’augmentation d’une rémunération indemnitaire, et non d’une augmentation du salaire de base. La revalorisation de ces indemnités ne permettra donc pas vraiment aux enseignants de créer de nouveaux droits à la retraite. En effet, pour les fonctionnaires, c’est le salaire indiciaire brut des six derniers mois qui sert de base au calcul de la pension de retraite. Les primes ne sont pas prises en compte dans ce calcul. Elles le sont dans le cadre de la retraite additionnelle, mais les cotisations à celle-ci sont fixées à 5% et sont assises sur les primes et indemnités perçues, dans la limite de 20% du salaire brut.
La rémunération des enseignants n’augmentera en réalité que de 5,5 % en moyenne par rapport à 2022, c’est à dire moins que la hausse de l’inflation qui a atteint 5,7 % au mois de mars.
C’est exaspérant de voir un ministre de l’Education nationale ignorer (ou feindre d’ignorer) qu’un logiciel existe déjà pour cela dans les établissements su second degré, qui ont été fortement incités à le choisir alors qu’il est est (très payant) et que des alternatives gratuites existaient. Combien va coûter ce nouveau logiciel inutile ? A quelle société va-t-il profiter ? A moins qu’il s’agisse d’un mensonge pour montrer que le ministère « fait des choses » ?
Extrait de la lettre envoyée par mail par le ministre aux professeurs : « Cette augmentation de rémunération s’adresse à vous, qui faites partie des 850 000 professeurs et personnels d’éducation, professeurs des écoles, professeurs certifiés, professeurs agrégés, professeurs d’éducation physique et sportive, professeurs de lycée professionnel, psychologues de l’éducation nationale, conseillers principaux d’éducation. Elle se traduit d’abord pour tous par un doublement du montant des primes (ISAE et ISOE pour les professeurs), sans condition. Elle se traduit aussi par une accélération des promotions dans les deuxièmes moitiés de carrière grâce à un accès plus ouvert à la hors-classe et à la classe exceptionnelle. Les rémunérations des débuts de carrière sont augmentées grâce à la hausse de la prime d’attractivité. Un professeur titulaire commencera dorénavant sa carrière avec une rémunération nette supérieure à 2 000 euros. Ainsi, ce sera, en fonction des situations, entre 100 et 200 euros nets de plus par mois. En outre, ceux qui le souhaitent pourront exercer des missions complémentaires. Elles seront attractives car elles compléteront significativement vos salaires et seront mieux rémunérées que les heures supplémentaires. Elles donneront chacune droit à une rémunération forfaitaire de 1 250 euros bruts annuels, soit 3 750 euros bruts annuels pour 3 missions. Elles permettront de favoriser la réussite des élèves, en assurant prioritairement la mission de remplacement de courte durée dans le second degré, et l’intervention des professeurs des écoles pour le soutien en 6ème dans le premier degré, à raison d’un engagement de 18 heures pour une année scolaire. Elles permettront aussi, pour un forfait de 24 heures à l’année, d’assurer par exemple du soutien dans le premier degré, « Devoirs faits » en classe de 6ème, etc. Ces missions seront aussi des missions de coordination des projets pédagogiques innovants dans le cadre du CNR Education « Notre école, faisons-la ensemble », de mise en œuvre de la découverte des métiers au collège, de professeur référent pour le handicap, etc. »
Extraits du dossier de presse consultable ici : « Dans un souci d’équité entre 1er et 2d degrés, la part fixe de l’Isoe et l’Isae, qui n’avaient pas été revalorisées depuis leur création, seront portées au même montant de 2 550 € annuels bruts à partir de septembre 2023. Cette augmentation, de 1 350 € annuels brut pour l’Isae et de 1 294 € pour la part fixe de l’Isoe, apportera, dès septembre, une hausse de rémunération de près de 100 € nets mensuels pour tous les enseignants. Pour reconnaître leur engagement et leur place dans la communauté éducative, les professeurs documentalistes verront leur indemnité de sujétions particulières également relevée à 2 550 € bruts par an, comme les autres enseignants du 2d degré. Les enseignants exerçant des fonctions particulières (conseillers pédagogiques, enseignants référents à la scolarité des élèves en situation de handicap, enseignants référents pour les usages du numérique, enseignants en milieu pénitentiaire, maîtres formateurs et formateurs académiques, etc.) bénéficieront d’une augmentation identique à celles de l’Isae ou de l’Isoe. Pour reconnaître leur responsabilité accrue en matière d’orientation dans les classes charnières, les professeurs principaux de 1re, de terminale et de 2e année de CAP verront en outre la part modulable de leur Isoe relevée de plus de 50 %, pour atteindre 1 476 € bruts par an. Cette augmentation s’ajoute à la hausse de la part fixe de l’Isoe. Acteurs majeurs du système éducatif et de l’épanouissement des élèves au sein de leur établissement, les conseillers principaux d’éducation et les psychologues de l’éducation nationale bénéficieront d’une revalorisation de leur indemnité de fonctions du même montant que celle de la part fixe de l’Isoe. » (…) Afin d’augmenter significativement la rémunération à l’entrée dans le métier, la prime d’attractivité sera revalorisée pour les 15 premières années de carrière, en complément du doublement du montant de la prime statutaire. Conformément à l’engagement pris par le président de la République, une rémunération d’au moins 2 000 € nets par mois sera ainsi garantie dès la titularisation pour les professeurs, les conseillers principaux d’éducation et les psychologues de l’éducation nationale. Les enseignants stagiaires percevront désormais la prime d’attractivité et bénéficieront ainsi d’une hausse totale de rémunération de 160 € nets par mois. Pour mieux reconnaître leur contribution au bon fonctionnement du système éducatif, tous les personnels contractuels (professeurs, CPE et psychologues de l’éducation nationale) bénéficieront de la hausse de l’Isae et de l’Isoe au même titre que les titulaires. Ils bénéficieront en outre d’un relèvement de leur prime d’attractivité à hauteur de 300 € bruts par an, ce qui portera leur gain total à plus de 100 € nets par mois. Les maîtres délégués du privé bénéficieront d’une rénovation de leur cadre de rémunération en cohérence avec celui des contractuels enseignants du public. (…) Sur la base du volontariat, les missions complémentaires seront assurées : pour certaines, sous la forme d’un volume horaire annuel ; pour d’autres, sous la forme d’un engagement annuel. Chaque mission fera l’objet d’une rémunération forfaitaire de 1 250 € brut annuels, soit 3 750 € brut annuels pour trois missions. Afin de garantir la lisibilité de la rémunération, celle-ci sera versée sous la forme d’une ou de plusieurs part(s) fonctionnelle(s) de l’Isae ou de l’Isoe. Un premier ensemble de missions portera sur des activités pédagogiques en présence des élèves. Le volume horaire des missions de face-à-face pédagogique : – 18 heures pour le remplacement de courte durée (professeurs du 2d degré) et les sessions hebdomadaires de soutien ou d’approfondissement en français ou en mathématiques en classe de 6e (professeurs des écoles) – 24 heures pour les autres missions. Dans le second degré, les professeurs pourront à ce titre : – assurer le remplacement de courte durée pour que les élèves bénéficient de l’ensemble des heures d’enseignement prévues à leur emploi du temps ; – participer au dispositif Devoirs faits (accompagnement au travail personnel) ; – accompagner les élèves en difficulté dans le cadre des stages de réussite proposés lors des vacances scolaires, notamment dans les secteurs défavorisés. Un second ensemble de missions portera sur le bon fonctionnement des écoles ou desétablissements et sur les projets des équipes : – la coordination et la mise en oeuvre de projets pédagogiques innovants, notamment dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) éducation « Notre école, faisons-la ensemble » ; – l’accompagnement renforcé des élèves à besoins éducatifs particuliers, notamment les élèves en situation de handicap ; – pour les professeurs du 2d degré, la coordination du dispositif de découverte des métiers de la 5e à la 3e : prise en charge des élèves par niveau, coordination et animation du dispositif et lien avec les entreprises. »
Bon, il ne s’agit pas d’une « revalorisation » , sauf pour l’ISAE et ISOE (soit 96 et 92 euros net par mois; comptés comme prime et donc ne rentrant pas dans le calcul de la retraite !), mais d’une incitation à travailler plus. Il est exact que les heures à faire (18 ou 24) seront mieux payées (69 ou 52 euros brut par mois). Question cependant : n’importe quel professeur pourra-t-il prétendre à n’importe quelle mission (je pense à l’accompagnement des élèves à besoins éducatifs particuliers) ? Autre question : qu’adviendra-t-il des heures supplémentaires effectives et des indemnités pour missions particulières ? Selon Julien Delmas, elles devraient être conservées, mais pour ma part, je pense que le gouvernement va les supprimer et ce faisant, va peut-être faire des économies budgétaires grâce à cette « revalorisation ». Dernière question : je donne trois heures de « devoirs faits » par semaine actuellement, ce qui représente bien plus que 18 ou 24heures annuelles. Pour égaler ce volume, un même professeur pourra-t-il effectuer plusieurs fois la même mission ? Sinon, j’ai peur que les heures de devoirs faits diminuent.
"D’un côté Alexandre Dumas, de l’autre Jules Verne."… et au milieu Freinet (d'après Michel Tournier)
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